UN FAUCON DANS LA VILLE
La première parution dans un magazine à grand tirage et l'odeur du papier frais, sont toujours très attendus pour un amateur j'imagine! ! ! Ce fût le cas pour moi en tout cas !
C'est en toute humilité que j'ai fait parvenir mon dossier à la Rédaction de Nat'Images, afin d'avoir un avis éclairé, et ce fut donc une bonne surprise quand ils m'ont annoncé qu'ils allaient publier mon article, dans le numéro 7 de Mars Avril.
Ce dernier n'apparaît pas en totalité, impératifs de mise en page obligent, le dossier faucon comprenant plusieurs photographes qui devaient se partager le thème.
En voilà donc un résumé :
Les aléas de la vie moderne, avec tout ce que cela peut comporter de négatif parfois, comme les journées où l’on ne prend plus le temps de rien, bien loin des valeurs d’origines, font que certains éprouvent le besoin de se rapprocher de la nature et des choses essentielles. C’est du moins vrai pour bon nombre d’entre-nous.
Mais alors, que penser lorsque cette nature s’invite en ville, puisque on l’imagine quitter un endroit tranquille, pour s’installer au milieu d’habitations, de circulation, de touristes en cette période estivale, et de tout ce que l’on pourrait voir de négatif, comparé aux côtés paisibles des champs et des bois.
Nous sommes mi-juillet, et c’est après avoir entendu une conversation concernant un petit village près de chez moi, en Languedoc Roussillon, habité par une colonie de faucons, que je me suis empressé d’aller sur place me rendre compte par moi-même.
Je n’en revenais pas ! A peine étais-je arrivé au pied de ce charmant petit fortifié, que des cris stridents et brefs attiraient mon attention.
Je levais donc les yeux et apercevais bon nombre de ces petits rapaces virevoltant au-dessus des toits, sans se soucier de ce qui pouvait bien se passer ici bas, au niveau des trottoirs et autres ruisseaux.
Ces maisons de village avaient l’air de convenir à merveille à ces faucons crécerelettes, car c’est bien d’eux qu’il s’agit.
Ce petit faucon migrateur, (falco naumanni) est insectivore et colonial. Son envergure peut atteindre 70 centimètres, sa taille varie de 29 à 32 centimètres pour un poids d’environ 160 grammes.
Le mâle apparaît plus coloré que sa compagne avec des tons gris bleus sur la tête, sur une partie de la queue et avec un bandeau de la même couleur sur les ailes.
Son dos est d’un roux plus uniforme que celui de la femelle, qui est pour sa part strié comme le reste de son plastron d’ailleurs...
... Je brûlais donc d’impatience de rencontrer Guy, lorsque j’appris que ce passionné observait depuis plusieurs années les petits faucons sur le toit d’en face...
... Nous fîmes connaissance et je me rendis vite compte que mon hôte était aussi bavard que moi sur les sujets qui le passionnaient...
... J’avais donc une vue imprenable sur le toit d’en face, au niveau de la première rangée de tuiles, mais avec une amplitude très limitée...
... Alors que nous discutions face à l’ouverture qui donnait sur la rue, le va et vient des faucons n’avait de cesse à moins de dix mètres de nous ; c’était plutôt encourageant, je râlais de n’avoir pas encore mis le matériel en place. Je trépignais d’impatience.
Le lendemain matin, à 8h00, j’installais mon matériel (trépied, petit siège pliant et accessoires), en prenant soin de mettre le filet de camouflage, pour dissimuler le moindre de mes mouvements...
... La lumière était plutôt bonne et je me disais que la mousse sur les tuiles vieillies donnerait sûrement un bel arrière plan...
... Après plus d’une heure d’attente, un premier faucon mâle vint se poser sur la gouttière. J’ai à peine eu le temps de faire la mise au point qu’il s’était déjà envolé.
Je pensais alors qu’il fallait simplement qu’il s’habitue au filet.
Mais au fur et à mesure de leurs allées et venues, je me rendais compte que ces petits oiseaux étaient plein d’énergie, et qu’il allait être très difficile de les mettre dans le viseur.
Première chose, laisser la main gauche sous l’objectif et l’index de l’autre sur le déclencheur, même si rien ne se présente dans le champ de vision (réduit), pour ne pas perdre la précieuse seconde qui change tout lors d’un atterrissage furtif.
Ensuite, éviter de bouger ne serait-ce que d’un centimètre l’objectif, quand l’oiseau regarde dans ma direction. (Le b-a bas en fait).
Et donc, prier pour que l’oiseau vienne se poser juste au bout du viseur, avec une attitude intéressante… Le rêve de tout photographe.
Les adultes revenaient vers les bords des toits assez souvent, pour nourrir leurs deux ou trois jeunes dissimulés assez loin, sous les tuiles ouvertes.
Mais ces visites ne durent qu’un bref instant, à savoir quatre secondes en moyenne d’après l’étude de la L.P.O., entre l’atterrissage, le nourrissage et l’envol !...
... Les toitures d’époque, et celles rénovées dans le même esprit, permettent aux crécerellettes de nicher à même le sol, ces derniers ne fabriquant pas de nid.
De plus, toute la toiture communiquant, les adultes peuvent entrer sous n’importe quelle tuile, afin de rejoindre les petits qui se promènent en toute liberté sous ces dernières.
Alors pas évident de se caler sous la bonne !
Près de vingt heures d’affût, espacées sur le temps, pour éviter les dérangements, tant pour les oiseaux et leurs jeunes que pour mon hôte fort sympathique, le tout sans bouger d’un pouce, afin de saisir les quelques attitudes des parents et de leur progéniture.
Le temps également de ne pas effrayer les jeunes et de les laisser tranquillement quitter leur tuile, et de monter sur le toit effectuer leurs premiers battements d’ailes.
Pas de dérangement apparent, puisque Guy m’explique que la Ligue de Protection des Oiseaux, est là depuis plusieurs années, et qu’elle a gardé le site secret durant tout ce temps pour favoriser la croissance de cette colonie.
En effet, à l’heure actuelle, seules deux colonies sont connues en France, l’une en plaine de Crau, avec environ 150 couples, et l’autre dans ce charmant petit village de l’Hérault avec environ 90 couples maintenant.
La gêne urbaine n’est donc pas révélatrice d’un quelconque dérangement puisque ces faucons ont choisi ce lieu pour leur nidification, à proximité plus qu’immédiate des habitants, à quelques centimètres à peine au dessus de leurs fenêtres.
Depuis peu, des sorties culturelles et pédagogiques sont même organisées avec l’aval de la L.P.O. afin de faire découvrir le village pittoresque et ses sympathiques crécerellettes, qui en sont devenus le point d’intérêt incontournable.
IL est arrivé à quelques reprises que plusieurs oiseaux se tiennent sur le toit, mais la focale imposante était difficile pour saisir l’ensemble.
Trop excité à la vue de leurs premières visites, j’en avais oublié la balance des blancs, qui en automatique ne donnait pas les résultats escomptés, à savoir fidèles à la réalité...
...Une fois le problème résolu, je pouvais me consacrer exclusivement au cadrage et aux attitudes très intéressantes de ce chasseur hors pair.
Tout d’abord quelques passages aux abords du nid pour évincer des juvéniles qui en font la visite pour pallier à leur désœuvrement.
Puis, des visites plus espacées, du mâle comme de la femelle pour nourrir ces petits becs affamés, bien à l’abri sous les toits.
Quelquefois une quarantaine de minutes entre chaque visite éclair, ne donnant pas toujours la possibilité de prendre une image. Grrrr !
Mon champ réduit ne me donnait pas la possibilité d’entrevoir ou de prévoir l’endroit d’un atterrissage. Mais bon, cette proximité avec une espèce assez rare, c’était déjà Venise !
Au final, plusieurs clichés et des moments inoubliables partagés avec ce petit faucon attachant, qui me font dire que la proximité entre l’homme et l’animal est possible, surtout quand c’est ce dernier qui la fait sienne...
... Je pliais donc bagage au bout de quelques jours à regrets, le village retombant peu à peu dans sa tranquillité d’antan, les oiseaux quittant le site à l’arrivée de l’automne.
Mais qu’à cela ne tiennent, je reviendrai pour parfaire une photothèque toute neuve, en espérant photographier encore quelques comportements supplémentaires, avec Guy comme guide passionné.